Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/538

Cette page a été validée par deux contributeurs.

trer en branle ; elle pèsera d’un poids très lourd sur les destinées du monde. — Et voici que l’Amérique du Nord, renonçant au système de paix et d’activité purement industrielle, s’engage dans des conflits qui vont l’obliger à des armements redoutables ; en saisissant Cuba, les États-Unis pénètrent dans l’Amérique latine, ils commencent à la démembrer et à la subordonner ; en éliminant l’Espagne, ils refoulent l’Europe. Et il est visible que contre le plus vieux des continents, l’Asie,, et contre le plus jeune, l’Amérique, l’Europe sera obligée bientôt de se défendre : or elle est livrée par les rivalités capitalistes et les haines nationales à une anarchie qui la paralyse. Seule, une Europe unifiée et harmonisée par le socialisme pourra résister aux formidables poussées qui se préparent, et appeler à la civilisation élargie les forces nouvelles qui s’agitent, sans que la haute culture européenne soit mise en péril. Mais quel est l’homme d’État qui ne sourira pas, comme de la plus vaine des utopies, de cette politique socialiste ? Et pourtant, on peut dire à la lettre que bientôt sans le socialisme, l’Europe sera en péril, et que, sans l’Europe, la civilisation humaine sera menacée.

Dans la guerre qui s’annonce entre les États-Unis et l’Espagne, il est impossible de former des vœux pour l’un ou l’autre des combattants. Ah ! s’il s’agissait vraiment de l’indépendance de Cuba, et des garanties