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l’aristocratie anglaise armant contre nous, pour sauver ses privilèges et ses grands fiefs coloniaux, toutes les forces monarchiques et féodales de l’Europe ; — c’est Napoléon, continuant et amplifiant la guerre au delà du nécessaire et du juste, par instinct, je le veux bien, par habitude peut-être, et par ennui, mais aussi pour continuer son absolutisme qui se serait forcément détendu dans la paix, et pour faire du peuple idéaliste et violent de la Révolution une démocratie héroïque et subalterne. — Plus tard, ce sont les aventuriers de Décembre, jouant d’une main tremblante et vieillie la France sur une suprême partie de dés ; — et c’est la noblesse militaire de Prusse, conduite par les Hohenzollern, imposant à l’Allemagne, par sa victoire sur la France, sa domination politique et sociale, et imprégnant de militarisme féodal l’unité allemande qui aurait pu s’accomplir par d’autres voies. — Partout, ce sont ces grandes compétitions coloniales où apparaît à nu le principe même des grandes guerres entre les peuples européens, puisqu’il suffit incessamment de la rivalité déréglée de deux comptoirs ou de deux groupes de marchands pour menacer peut-être la paix de l’Europe. Et alors, comment voulez-vous que la guerre entre les peuples ne soit pas tous les jours sur le point d’éclater ? Comment voulez-vous qu’elle ne soit pas toujours possible, lorsque, dans nos sociétés livrées au désordre infini de la concurrence,