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main amie à la démocratie socialiste allemande, de constater que ce sont les socialistes allemands qui ont pris l’initiative des mesures libérales qui réjouissent en ce moment l’Alsace-Lorraine. Ils ont même, dans cette question de la dictature, devancé les députés alsaciens. Et avec quelle hardiesse, avec quelle hauteur de parole ils ont condamné les brutalités rétrogrades ! «Vous ne vous souvenez donc plus — s’est écrié Bebel, dont je cite textuellement les paroles, — du temps où vous protestiez contre les vexations dont souffrait le Schleswig allemand ? Vous ne vous souvenez donc plus de vos protestations contre le régime que les Autrichiens imposaient à la Lombardie et à la Vénétie ? Et pourtant les Autrichiens avaient sur la Lombardie et la Vénétie le même droit que vous avez sur l’Alsace-Lorraine, je veux dire le droit du glaive. En vérité ! l’esprit public de l’Allemagne a sombré à des profondeurs infinies. » — J’espère, si en 1870 la victoire s’était prononcée pour nous, et si la France conquérante avait saisi Cologne ou Mayence, comme la Prusse conquérante a saisi Strasbourg et Metz, que nous aurions eu, nous socialistes français, le courage de tenir le langage que tiennent les socialistes allemands. Je l’espère, ou plutôt j’en suis sûr, mais je sais aussi combien de préjugés nous aurions heurtés, combien de passions orgueilleuses nous aurions scandalisées ; et je sais gré aux socialistes allemands de les affronter aussi hardi-