Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/372

Cette page a été validée par deux contributeurs.

prolétariat, les délégués allemands n’auraient pas pu y réchauffer leurs espérances de liberté et de droit. On peut donc dire que, par la seule action de sa politique intérieure, par la seule existence de la République et des libertés républicaines, la France est de moitié dans ces élections qui, affaiblissant l’autocratie prussienne, préparent un régime d’équité et de paix entre les nations.

Or, jusqu’ici, nous nous sommes bornés à résoudre le problème politique dans le sens de la liberté ; que sera-ce donc le jour où nous résoudrons le problème social dans le sens du droit ? Si la France, par des mesures hardies, émancipait et organisait le travail, elle exercerait sur la démocratie européenne une action incalculable qui tournerait à la grandeur de notre pays. Quand les timides ou, comme ils s’appellent à tort, les modérés, nous prient, au nom du patriotisme et en invoquant les périls extérieurs qui enveloppent la France, de renoncer aux grandes ambitions réformatrices, d’ajourner le rêve de justice, ils commettent, croyons-nous, une erreur absolue ; car ce qui peut le mieux conjurer les périls extérieurs et restituer à la France toute sa place dans le monde, c’est justement une politique hardie qui aille au cœur de la démocratie européenne. Croyez-vous, oui ou non, qu’il y ait intérêt, pour la solidité de la paix et pour la grandeur française, à renforcer la démocratie allemande ? Et