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orateurs du parti national-libéral, apprivoisé par M. de Bismarck, qui signalaient récemment au Reichstag la détresse des populations ; enfin, la puissante organisation ouvrière des bassins houillers a montré au militarisme allemand qu’il faudrait compter avec la force des travailleurs.

Je ne prétends pas, remarquez-le bien, que tous ces germes répandus de droit démocratique et de justice sociale puissent se développer aisément : voyant les obstacles qui s’opposent, en France même, dans une démocratie républicaine, au droit humain, je mesure fort bien les obstacles qui se dressent ailleurs. Mais je dis que, dans l’état actuel des masses européennes, la commotion d’un grand exemple servirait beaucoup à l’émancipation générale des nations. Le peuple qui, le premier, saurait résoudre le problème social, replacer la propriété sur sa véritable base qui est le travail, aider le paysan dans l’acquisition de la terre, et constituer à l’ouvrier de l’usine des droits certains, une action certaine, équivalent de la propriété, ce peuple-là serait pour les autres peuples, qui cherchent à tâtons sous les tyrannies, une lumière et une force. Il serait bientôt, par conséquent, le premier parmi les peuples.

Or, si notre patriotisme républicain ne nous égare pas, la France libre peut seule aujourd’hui prétendre à ce rôle. Les États-Unis sont trop loin ; puis, une immigration énorme, chinoise et européenne, charrie