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qu’il est assez agréable de sonner du clairon : cela vous donne un air brave ; mais il vaut mieux réserver son souffle pour l’heure du danger et, en attendant, dire la vérité, qui est que le maintien de la paix est notre premier devoir. Avez-vous remarqué que, dans ces grandes questions internationales, depuis plusieurs années, notre tribune est muette ? Dans un pays d’autocratie, comme l’Allemagne, le ministre des affaires étrangères raconte tout haut sa diplomatie. Le nôtre, délégué d’une nation souveraine, se tait. Pourquoi ? C’est que. d’une part, le gouvernement français ne pourrait dire sans crime et sans scandale : « Nous abandonnons l’Alsace et la Lorraine ». et que, d’autre part, il ne pourrait dire, sans provoquer une guerre immédiate : « Nous voulons les ressaisir. »

Un jour viendra pourtant où, tout le monde ayant parlé en Europe, il faudra bien que notre pays parle à son tour, qu’il montre à tous le fond de son âme généreuse et sage. Je voudrais que, ce jour-là, notre gouvernement pût dire avec l’assentiment de la nation : « Nous sommes un pays de démocratie, c’est-à-dire de paix, de travail et de justice. Nous n’avons pas oublié que la force, dans une année terrible pour nous, a triomphé du droit ; mais la plus grande revanche du droit sera qu’il triomphe à son tour sans le concours de la force. Prêts à faire face à tous les périls et à