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envahissante, et dangereuse pour tous : c’est la ligue de Richelieu et des puissances protestantes contre la maison d’Autriche ; la ligue de l’Europe contre Louis XIV et Napoléon Ier. Pourquoi une pareille alliance défensive ne s’est-elle point organisée en Europe, au lendemain de Sadowa et de Sedan, contre l’hégémonie allemande ? C’est, il faut bien le dire, que, pour la première fois peut-être dans l’histoire, on a vu une nation conquérante s’arrêter après deux victoires. L’empereur Guillaume ne s’est laissé aller ni à l’orgueil démesuré de Louis XIV, ni aux terribles fantaisies d’artiste de Napoléon Ier. Il avait d’ailleurs, autour de lui, non plus cette Europe morcelée, disloquée, qui fut pour ses devanciers en grandes rapines une irritante tentation, mais un groupe de nations compactes, résistantes, qui l’invitaient à la sagesse. Voilà pourquoi, depuis quinze ans, il a eu en Europe non des adversaires unis pour abattre sa force, mais des courtisans empressés à solliciter ses faveurs. En ces derniers temps, comme cette sagesse relative semblait se lasser et faire place aux aventures, on sentait poindre vaguement aussi en Europe, entre la France et la Russie, sans qu’aucune parole eût été échangée, une coalition défensive.

Il est un troisième cas d’alliance, c’est celui où plusieurs États s’entendent pour une action rapide, pour un coup de main : l’Autriche, la Prusse et la Russie