Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/229

Cette page a été validée par deux contributeurs.

que si vous voulez adapter et humilier votre enseignement jusqu’à répondre à toutes les susceptibilités qu’on essaiera de créer contre vous, ce n’est pas seulement à l’opinion socialiste, c’est, dans une large mesure, à l’indépendance de la pensée laïque que devront renoncer les maîtres de l’enseignement public. Vous savez bien, et M. le président du conseil le sait bien aussi — c’est un des actes de son administration qui comme ministre de l’Instruction publique lui font le plus d’honneur — il sait bien qu’il a été obligé de défendre contre toute sorte de périls qui menaçaient sa carrière un professeur de l’Ariège qui n’était pas socialiste, mais qui avait soulevé contre lui certaines animosités locales, non point par la propagation des idées socialistes, mais parce qu’il allait dans les communes rurales, dans les hameaux, avec cette conviction qu’à la morale traditionnelle du prêtre il faut opposer la morale nouvelle de la pensée laïque. Et parce qu’il allait prêchant, comme c’était son droit et comme c’était son devoir d’éducateur public, la morale indépendante fondée sur la seule conscience humaine, sur la seule raison, il a été en butte aux mêmes dénonciations, à la même animosité, aux mêmes calomnies que les propagandistes du socialisme. Et si vous n’aviez pas eu, monsieur le ministre, devant la loyauté évidente de cet homme, un mouvement de générosité démenti à l’heure actuelle par les principes que vous