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la réflexion ; mais ils ajoutaient que Jésus enfant souffrait au berceau beaucoup plus que les autres enfants, parce qu’il prévoyait avec sa science toute divine que dans huit jours son sang allait couler sous le couteau de la circoncision. Cela dégoûte du christianisme pour cinq ou six ans au moins. Avis à ceux qui croient, comme il en est plusieurs dans la génération nouvelle, qu’il suffit, pour rouvrir devant l’humanité les grands horizons religieux, d’un petit voyage d’imagination en Palestine ! Il est imprudent de flirter avec les Évangiles d’un air doucereux, car l’Église s’en est emparée et elle y glisse à l’improviste les puérilités du jésuitisme espagnol.

Si l’on tenait encore aujourd’hui à quoi que ce soit, le livre du P. Didon sur Jésus-Christ, qui a provoqué seulement quelques réflexions anodines, aurait fait beaucoup de bruit. C’est un livre terrible pour les croyants. Le P. Didon a voulu raconter, par le menu et presque mois par mois, une existence dont on ne sait presque rien ; et il est obligé à tout moment de combler des lacunes énormes par l’hypothèse. Pendant cette période, Jésus a dû faire ceci ; il est probable qu’à ce moment-là Marie était morte, car on n’en entend plus parler ; peut-être s’était-elle réfugiée chez des cousins. Toutes ces lacunes sont comme voilées dans les Évangiles, qui résument surtout la substance morale et religieuse de la vie du Christ ; elles apparaissent terriblement