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l’amour en visites

douche glaciale de la cécité de ce regard.

Il se remémore les plats de son déjeuner, chez Foyot. avec son oncle Georges. Pas folichon, l’oncle Georges !… Il a mangé des côtelettes de veau en papillotes sur des épinards au jus… Franchement, il n’y a pas de quoi s’emporter. Un vin fort honorable et du café sans liqueur, parce que l’oncle n’aime pas à troubler l’odeur du moka.

Et puis, là, il est bien bon de se demander pourquoi il est dans cet état… c’est son état normal.

« Oui. Madame, » déclarent ses yeux, se levant à leur tour, malgré lui.

Elle a un sourire très bon, de plus en plus calme.

« C’est ton duc, ma chère, qui devait s’amuser ! » gronde intérieurement le jeune homme.

Pourtant, de beaux restes, des mains divines et la taille comme une hampe de drapeau. Non, elle n’est fichtre pas laide. Ses prunelles de bizarre métal s’éclairent de phosphore. Elle doit faire plier les jarrets des chevaux qu’elle monte, sans efforts.

« Vous dînez avec moi, cher Monsieur ? »