Page:Janet - Le cerveau et la pensee, 1867.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

disait-il, est un matras. Selon moi, l’idiot est celui dont le cerveau contiendrait le moins de phosphore ; le fou, celui dont le cerveau en contiendrait trop ; l’homme ordinaire, celui qui en aurait peu ; l’homme de génie, celui dont la cervelle en serait saturée à un degré convenable. » En Allemagne, Feurbach avait pris tellement au sérieux cette théorie du phosphore, qu’il n’hésitait pas à signaler comme une cause de l’affaiblissement des caractères en Europe l’usage exagéré de la pomme de terre, qui contient peu de phosphore. Pour régénérer les peuples et relever le tempérament moral de l’humanité, il proposait de remplacer la pomme de terre par la purée de pois, aliment très-phosphoré. Ces extravagances avaient leur origine dans le mémoire d’un savant chimiste, M. Couerbe, qui avait cru trouver en effet dans le phosphore le principe excitateur du système nerveux. Suivant lui, le cerveau des hommes ordinaires contient 2,50 pour 100 de phosphore ; celui des idiots de 1 à 1,50 ; celui des aliénés, de 4 à 4,50. Il en concluait que a l’absence de phosphore dans l’encéphale réduit l’homme à l’état de la brute, qu’un grand excès irrite le système nerveux et le plonge dans ce délire épouvantable que nous appelons la folie, enfin qu’une proportion moyenne rétablit l’équilibre et produit cette harmonie admirable qui n’est autre chose que l’âme des spiritua-