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sentent spontanément et en quelque sorte automatiquement. « Le docteur Forles Winslow rapporte l’observation d’un officier d’artillerie, qui, à la suite d’une attaque de paralysie, ne pouvait plus parler lorsqu’il essayait de le faire. Toutes ses tentatives n’aboutissaient qu’à un murmure inintelligible ; cependant il pouvait articuler distinctement tous les mots qui lui venaient spontanément… Un malade ne pouvait prononcer volontairement les lettres k, q, u, v, w, x, z, et prononçait très-souvent ces mêmes lettres dans les mots où elles s’unissent à d’autres. Un autre, cité par M. Moreau (de Tours), ne devenait aphasique que lorsqu’il avait la volonté réfléchie et consciencieuse d’articuler. — Sous l’empire d’une passion très-vive, on voit l’aphasique retrouver momentanément la parole. — M. Rufz cite l’observation d’une femme qui recouvra la parole dans un accès de jalousie et la reperdit immédiatement après. On peut aussi, par l’association des signes, réveiller la mémoire des signes oubliés : un aphasique, qui répétait indéfiniment « tout de même, » et pas autre chose, pouvait réussir à prononcer quelques mots, à condition qu’on les fit précéder du mot tous. Il pouvait dire tous les élèves, tous les rideaux, quoique incapable de répéter les mots élèves et rideaux[1].

  1. Discours de M. Baillarger, p. 824, 827.