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Scène Troisième


La petite vieille pousse la porte moussue et vermoulue de la cabane qui se confond avec l’arbre qui l’abrite. Une espèce de verdure dorée tapisse l’intérieur de la hutte rongé par des lichens. Dans les fentes des planches poussent des violettes. Des lierres entrent dans la cabane, mêlés à des roses qui s’étouffent entre elles, collent les bouches rouges de leurs pétales aux trous d’azur qu’ont creusés les piverts, sont sucées par des guêpes.

Au milieu de la cabane, et débarrassée de ses vêtements grossier, humides encore de la rosée nocturne, se tient une jeune bûcheronne.

Elle est nue comme la lumière et comme l’eau. Et, tandis que le soleil chante au dehors, elle se courbe, un pied posé sur un fagot de frais noisetiers sauvages que son bras levé ébranche avec une hachette. Des bétes-à-Bon-Dieu courent sur le sol couvert de brindilles.

La Jeune file se retourne soudain, mais n’aperçoit tout d’abord que la petite vieille qui est sa grand’mère.

De la nuque aux talons, elle n’est qu’une courbe ensoleillée. Ses cheveux sont blonds et ses yeux bleus.