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épaules nues parlent continuellement à notre cœur en frappant nos yeux, et leur langage tout muet qu’il est, est d’autant plus dangereux qu’il n’est entendu que de l’esprit, et que l’esprit se plaist à l’entendre. Qui scait enfin que les discours d’une femme s’ils choquent la pureté, nous choquent malgré nous, et nous donnent un dégoust secret et une espèce d’aversion et de mépris pour celle qui les prononce ; mais la beauté d’une gorgé que l’on présente à notre vue, n’a rien qui nous rebute, n’a rien qui ne nous attire. Nous commençons à la regarder sans répugnance, nous continuons à la regarder avec plaisir, nous la voyons ensuite avec émotion, et comme elle ne cesse point de nous parler à sa mode, de nous solliciter et de nous plaire, elle triomphe enfin de notre liberté après avoir trompé nos sens.

XL. De sorte que nous pouvons hardiment conclure que les filles et les femmes qui paroissent en public les bras, la gorge et les épaules nues sont plus blâmables que celles qui par des discours impurs et lascifs tachent de porter les hommes au libertinage, non seulement, parce qu’elles surprennent plus de personnes dressant indifféremment des pièges à tout le monde, ce que les femmes les plus débauchées n’oseroient faire par leurs discours : mais en-