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— Non.

— Vous ne voyez pas davantage de bateaux que tout à l’heure ?

Du coup, Candi et Jean observèrent la plage avec plus d’attention, et l’Italien, après un instant d’hésitation, murmura :

— Il mé semble qu’il y en a oune dé plous.

— Il vous semble droit, Candi.

— Qué céla signifie ?

— Je ne fais pas là action de le savoir, mais je suis inquiété.

— Allons voir.

— Oui, allons.

Jean approuva de la tête ; les trois hommes s’approchèrent de l’embarcation suspecte, non sans avoir mis le couteau à la main. Précaution inutile : la pirogue, car c’était une longue pirogue indienne, ne contenait aucun batelier, aucun voyageur.

— Ah çà ! maugréa Jean, elle n’est pas venue toute seule.

— Sois en sour, mio figlio, repartit Candi, si tou en veux la preuve, vois lou câble qui amarré l’esquif à la rivé. C’est oun main houmaine qui l’a tendu.

— Mais où est cette main ?

— Avé lou bras qui la soupporté, sans aucoune doute, et ce bras, il est certamente (certainement) en train dé lever oun verre dedans la botearia.

— Diable !

Il y eut un silence, puis résolument l’ingénieur reprit :

— Une pirogue, donc des voyageurs qui ne nous connaissent pas. Rien à craindre d’eux ; rentrons et reprenons des forces pour fournir une longue route demain.

Sans répliquer, les bandits se mirent en marche derrière Jean. Mais leurs yeux, sans cesse en mouvement, décelaient la crainte d’une attaque soudaine, et leurs navajas, à demi sorties de leur ceinture, montraient qu’ils étaient prêts à faire face au danger.

Une lumière brilla soudain à l’intérieur de l’osteria. Les nouveaux venus ne se cachaient donc pas.