Page:Ivoi - Le Maître du drapeau bleu.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
58
LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Mois j’ai peur de ces espions.

— Peur ? pourquoi ? On ne nous veut évidemment aucun mal… pour l’instant. Dînons, ma jolie duchesse… Rien ne donne du cœur comme un estomac satisfait.

Elle consentit à prendre place devant la table, et Lucien s’étant improvisé maître d’hôtel, l’on dîna presque gaiement.

La chère, du reste, était exquise, avec un parfum d’exotisme tout à fait charmant pour deux Parisiens ; si bien que Sara finit par rire de ses emportements passés.

— Je n’ai pas réfléchi… Il y a la machinerie, les cales, les soutes, sur ce bateau… Tandis que nous cherchions en haut, Log et ses gens se dissimulaient en bas… Une simple partie de cache-cache… J’ai eu bien tort de me fâcher… Avec tout cela, où sommes-nous ?

— Où, murmura Lucien, je l’ignore… nous sommes en bateau, voilà tout ce que je puis affirmer.

— Mais sur quels degrés de latitude et de longitude ? Ou pour parler marin, quel point ?

— Je ne saurais répondre que par un point… d’interrogation.

Elle fronça les sourcils… Un peu plus, elle allait gourmander son époux sur sa légèreté.

Elle n’en eut pas le temps.

Un organe grave, un peu nasillard, prononça ces paroles :

— Demain, à midi, sur le spardeck… vous recevrez tous renseignements à cet égard.

Tous deux sautèrent sur leurs sièges et promenèrent autour de la cabine des regards ahuris. Ils étaient seuls, bien seuls. Et pourtant la voix continuait :

— Ceux que l’on emploie doivent connaître le but. Comme cela, le manque de zèle est impardonnable. Ne craignez pas de questionner. On vous répondra toujours.

— Qui parle ? balbutia la jeune femme, dont l’épiderme était parcouru par des frissons.

— Qui ?… Regardez le panneau, à droite de la porte.

— Je regarde.

— Et ne vous effrayez pas, madame la Duchesse… Songez aux téléphones, aux téléphotes, cinémato-