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— Cela n’est pas pour m’effrayer… Qui sait répliqua doucement Pierre, je serai entre vous et le malheur ; entre vous et le crime… Qui a voulu cela, je l’ignore… Il m’importait peu. Amie ou ennemie, je remercie la volonté qui m’a conduit.

Et comme la porte du salon s’ouvrait lentement, il acheva vite :

— Permettez-moi de me présenter chez vous demain, mademoiselle. En présence de Mme votre mère, je vous conterai dans ses moindres détails l’aventure qui m’a amené, moi, marquis Pierre de Chazelet, jusqu’ici.

La comtesse, entourée par plusieurs personnes, apparaissait sur le seuil.

Il fallait répondre sans retard, le loisir de la discussion n’existait pas.

— Demain soir, fit-elle dans un murmure, nous serons seules ; nous vous attendrons.

Puis, courant à Mme de Armencita :

— Ah ! s’écria-t-elle, toute la fantasmagorie de ce soir m’a brisée, et je me serais endormie, je crois, si M. le marquis de Chazelet n’avait réussi à m’intéresser à une histoire de gitana qu’il rapporte d’Espagne.

Cotait une présentation indirecte.

La comtesse et Pierre échangèrent une inclination.

— Et si vous n’y voyez pas inconvénient, continua la jeune fille, je serais heureuse de rentrer, pour me remettre des émotions de la soirée.

— Je désirais vous faire la même proposition, Linérès.

— Tout est donc au mieux.

Un salut gracieux au marquis, et la charmante créature, prenant le bras de celle qui, désormais, ne serait plus pour elle qu’une mère adoptive, quitta le petit salon.

Chazelet y demeura, avec quelques curieux, espérant tirer de lui quelques bribes de sa conversation avec Linérès, ce point de mire des curiosités du Tout-Paris élégant rassemblé à la légation.

Mais Pierre n’était point en humeur de se prêter aux désirs bavards des oisifs.

Il était arrivé avec Morand.

À peine entré, il avait entendu prononcer le nom de Linérès ainsi que ceux de Foorberg, Marahi…

Ces derniers lui étaient demeurés indifférents, toute son attention étant accaparée par le seul nom de la jeune fille.