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Rien ne rend ingénieux comme la volonté de gagner mille dollars.

Van Reek, ignorant de la manœuvre, accusait la fatalité.

Et cependant, il devait reconnaître que les agents de son train ne négligeaient rien pour distancer le spécial chasseur.

L’allure était terrifiante. Quand des buissons bordaient la voie, l’œil ne les distinguait que sous la forme de raies vertes filant comme les traits de la foudre. La vitesse était donc anormale, excessive, folle. Le train semblait emballé. On pouvait presque considérer comme un miracle qu’une catastrophe ne se fût pas encore produite.

Mais malgré les efforts du mécanicien, que le chauffeur secondait en chargeant le foyer, la distance entre les deux spéciaux n’augmentait pas.

Le poursuivant restait, si l’on peut exprimer ainsi la situation, sur les talons du poursuivi.

Tout le jour s’écoula, dans cette chasse passionnante pour l’un, effroyable pour l’autre. La nuit fut annoncée par le crépuscule.

La voie pénétrait alors dans la région montagneuse et tourmentée que parcourent le rio Gila et ses affluents. Ce n’étaient plus que tranchées rocheuses, paliers en corniche, viaducs franchissant à grande hauteur des ravins, où bondissaient en écumant des cours d’eaux torrentueux.

Dans une heure et demie, on arriverait à San-Diego.

Là-bas, au terminus, des policiers attendraient sur le quai et inviteraient poliment Van Reek à les suivre là où il ne se souciait pas d’aller.

Oh ! maudite idée de prendre un train spécial, qui, par son caractère même, est signalé sur toute la ligne, et transforme le voyageur en véritable prisonnier.

Dans un convoi ordinaire, on est perdu au milieu de la foule. On peut, avec de l’adresse, disparaître à une station quelconque, glisser entre les doigts des gens de police.

Mais ici… Aucun moyen d’échapper à son sort.

Et Van Reek se penchait à la portière, cherchant à apercevoir dans la nuit ce train fantôme qui le pourchassait.

Soudain, il se rejeta en arrière, avec un cri d’épouvante.

— On franchissait un viaduc, auquel les nécessités