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— Tous vaincus ! Je reste seul. Victoire ! Victoire ! Gloire à Kan-So !… Salue, peuple, salue mon or.

Il saluait à la ronde, gravement, puis reprenait sa danse macabre. Cela dura de longues minutes. Enfin, hors d’haleine, à bout de forces, le Chinois tournoya sur lui-même et s’affala tout de son long sur la terre, où il demeura inerte, comme privé de sentiment. La bougie répandait sa lueur tremblotante sur les trois corps étendus.

Elle diminua lentement… Enfin, elle grésilla, la mèche, carbonisée, se renversa dans les dernières parcelles de cire fondue, et s’éteignit.

Longtemps après, des lueurs rougeâtres emplirent les galeries circonvoisines. Des pas furtifs troublèrent le silence de la carrière. Et enfin, des êtres bondirent dans la « salle », brandissant des torches.

— Les voilà ! Les voilà ! Ils sont morts !

— Non, pas celui-ci, il dort.

— Kan-So, prononça une voix grave.

Jud Allan, toujours sous son déguisement, venait de parler.

— Nous tenons celui-ci, enfants. Il nous indiquera ce que je veux savoir.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

L’espoir d’Allan ne devait pas se réaliser. Le surlendemain, les journaux de la région publiaient l’entrefilet suivant :

« Notre région sembla destinée à occuper la plume des chroniqueurs.

« Hier, deux jeunes gens d’Ottawa, au cours d’une partie de canot, rencontrèrent, sur le rivage de la Susquehannah, un homme qui se livrait à des manifestations si hétéroclites, qu’ils le jugèrent privé de raison. Ils parvinrent à le prendre dans leur embarcation et le remirent aux mains du premier policier qu’ils purent joindre.

« Or, le fou, car le personnage est bien réellement fou, ne serait autre que le très honorable Kan-So, bien connu dans le monde des businessmen, parmi lesquels il occupait une situation enviée.

« Par quelle suite de circonstances l’infortuné gentleman est-il venu échouer dans notre région ? Comment sa raison a-t-elle sombré ?

« C’est et ce restera probablement un mystère ; car sa folie, du genre incurable dit des grandeurs, ne permet point d’espérer le réveil de cette brillante intelligence. »