hommes d’un nuage de vapeur brûlante qui leur corroda fortement la peau du visage et des mains. Suffoqués par une senteur âcre, astringente, ils perdirent connaissance.
« Quand ils revinrent à eux, le train était arrêté en pleine voie, le conducteur du fourgon d’arrière les secouait… Les voyageurs, descendus sur la voie, s’enquéraient de la cause de l’arrêt.
« Il leur était extrêmement pénible de parler, les muqueuses du nez et de la bouche étant fortement brûlées. Un médecin a déclaré qu’il croyait reconnaître les ravages d’un composé de l’azote ou du brome.
« Entre l’instant où ils avaient perdu la conscience et celui où on les rappelait à eux, voici ce qui s’est passé.
— Ah ! Ah ! murmurèrent les auditeurs, impressionnés par le récit.
— Dans le fourgon de tête, accroché immédiatement après le tender, avaient été chargées dix-sept barres d’or, de cent kilos chacune, expédiées par l’Oil Bank à une banque de New-York.
— Dix-sept, cent kilos chaque, répéta la foule avec une évidente admiration.
— Comme je vous le dis… Dans ce fourgon, outre le conducteur de train, se trouvait un garde accompagnant l’envoi de l’Oil Bank.
« Le premier a reçu une balle dans la tête et il est à l’agonie.
« Le second a eu la poitrine traversée par un couteau manié d’une main experte. Il ne passera pas la journée, mais voici ce qu’il a raconté :
« Graffsend, le conducteur, et lui, Felton, se trouvaient dans le fourgon, dont les glissoires, de chaque côté, étaient fermées à clef, — à clef, remarquez ce détail qui démontre la préméditation et l’audace des voleurs.
« Ils jouaient aux cartes, pour l’honneur, histoire de ne pas succomber au sommeil.
« Tout à coup, il leur sembla percevoir un léger bruit le long de la paroi faisant face aux bois de Lincolt.
« Avant que les deux hommes eurent pu échanger une réflexion, le loquet de la porte glissa, évidemment actionné par une fausse clef.
« Graffsend bondit vers le frein à main, avec l’intention de l’actionner et de déclencher la sonnerie d’alarme. Il n’en eut pas le loisir. Une détonation