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qui doit prendre fin. Désormais, vous y renoncerez, cela est certain, car votre prétexte vous échappe. Révoltée de vos agissements misérables, Lilian a cherché une protection, un refuge, auprès de ceux que vous vous proposiez de mettre à contribution. Puissiez-vous vous repentir ! »

Le billet n’est point signé.

Le sens n’en apparaît pas clairement d’abord au professeur de West-Point. Mais, tout à coup, une phrase se détache, lumineuse, flamboyante :

Lilian, dit-on, a cherché une protection, un refuge contre lui-même.

— Folie, gronde-t-il. Folie… Lilian ne saurait se défier de moi.

Mais une pensée le secoue :

« Il lui est arrivé malheur… Oui, c’est cela… Un malheur !… »

Et livide, éperdu, il se rue en avant, atteint le portail de l’Institution Deffling, frappe du marteau à coups redoublés, et se trouve enfin devant la directrice accourue au bruit, qui considère avec inquiétude le jeune homme, dont l’apparence est celle d’un dément.

— Lilian ? Où est Lilian ? clame-t-il d’une voix faussée par l’angoisse… Laissez-moi passer… Il le faut ! Il le faut !

Le mouvement de recul de miss Deffling, terrifiée par cette exaltation, l’avertit de l’incorrection de son attitude.

Il domine ses nerfs par un effort surhumain dont tout son être frissonne.

— Je vous prie de m’excuser, fait-il d’un accent assourdi, mais une lettre, qui m’est parvenue ce matin, m’a causé les plus vives alarmes. On m’annonce que… ma sœur a quitté la pension.

Miss Deffling a un sourire dédaigneux. Elle jette en avant ses mains osseuses en un geste de dénégation.

— Cela est tout uniment une facétie d’un goût exécrable. C’est vouloir calomnier ma maison, qui, j’ose le dire, est tenue comme aucune autre de la ville.

Son assurance gagne Allan lui-même. Cependant il insiste :

— J’aurais dû me dire cela de suite. Seulement, je fais appel à votre condescendance. J’ai ressenti une émotion violente, vous le comprenez, et j’ai besoin, pour être complètement tranquillisé, de voir…