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Et il se penche vers le captif, hors d’état de s’opposer à son mouvement ; de la pochette, fixée à la ceinture du malheureux, il tire un revolver, l’examine.

— Il est chargé. C’est admirable. L’une des cartouches que toi-même a glissées dans le barillet, te trouera le front… Eh ! eh ! je ne suis pas cruel. Une balle, une détonation, ce sera fini.

Puis, lentement, et de plus en plus ironique :

— Tu le vois, même si tu pouvais parler, la moindre récrimination serait de ta part une inconvenance, car je suis bon, et puisque tu crois à une vie future, je t’accorde dix minutes pour préparer ton départ vers l’éternité.

Pariset est livide. Il essaie de parler, mais le bâillon ne laisse passer que des sons inarticulés.

Il y a dans les regards de l’homme qui va mourir, de la haine, de l’épouvante, et aussi une surprise affolante… Ce dernier sentiment même doit dominer… Quoi, le parent de sa femme, l’homme qui fut son ami, est celui par la main duquel il va périr !

— Et la petite chose ? interroge Foorberg.

Le chef masqué désigne le paquet qu’il a posé à terre.

— Quelques gouttes de laudanum. Elle dormira jusqu’au retour au bateau.

— Parfait !

— Et, là, je verrai ce que l’on peut faire du gamin que Tom et Jetty m’ont si vivement recommandé.

Nul ne s’occupe plus de l’enfant. Une discussion s’est élevée parmi les meurtriers au sujet de Jud. Jetty et Tom le louent. Foorberg et Van Reek le critiquent. Ah ! s’il pouvait voler l’enfant !

Il se souvient des pâturages traversés par lui avant d’atteindre la pulqueria. Il y avait là des chevaux en liberté… S’il arrivait là, s’il bondissait sur le dos d’un des animaux… Ce serait le salut, peut-être.

Un coup d’œil à ses adversaires. La discussion s’est animée… Les bandits ont oublié tout pour discuter sur l’opportunité d’adjoindre à la troupe le gamin, qu’ils ne supposent pas si près d’eux.

C’est le moment d’agir. Jud se glisse près de l’enfant. Il l’attire à lui. Il le tient. Un trouble inconnu l’étreint lorsqu’il presse dans ses bras la petite créature. Oh ! il faut réussir. Il ne veut pas mourir, puisque sa mort entraînerait celle de Lilian.

Avec le bébé endormi, il disparaît parmi les aloès…