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de charnières de cuivre, remplaçaient les tables absentes.

Cette installation primitive n’empêcha pas le gamin de dévorer à belles dents quelques tranches de jambon fumé, accompagnées d’une copieuse ration de haricots rouges, le tout arrose d’un verre de vin rosé de Californie.

Son compagnon l’avait quitté et s’entretenait à voix basse, avec plusieurs hommes attablés à l’autre extrémité de la cabine-réfectoire. Tout en mangeant, le chevalier-vagabond les considéra.

Tous portaient sur leurs traits les stigmates du vice. Leurs yeux décelaient la fourberie et la cruauté.

Tous robustes, par exemple, ils constituaient, avec Tom et Jetty, une huitaine d’individus dont le voisinage eût pu épouvanter l’homme le plus courageux.

Jud, inconscient du danger, n’éprouva que de la curiosité.

Sans paraître prêter attention, il tendit l’oreille. Des mots sans suite lui parvinrent seuls. Les bandits causaient avec une sourdine prudente.

Toutefois, au bout d’un quart d’heure, le gamin savait que ses compagnons avaient vu le jour dans les contrées les plus diverses.

Tom et Jetty, les premiers en date dans ses relations, étaient : le premier, Américain ; le second, Irlandais.

Auprès d’eux se tenaient trois individus bruns, de taille moins élevée, mais dont les épaules développées annonçaient une vigueur équivalente. Ils répondaient, l’un au nom espagnol du Todero, les deux autres au vocable basque d’Elisalt et à l’appellation florentine de Zirini.

Puis venait un personnage long, sec, maigre, dont la face anguleuse montrait une teinte jaune, des yeux bridés, dénotant une origine chinoise, ce que confirmait, du reste, son nom bien célestial : Kan-So.

Enfin, deux individus, de haute stature, le teint coloré, adornés, qui de cheveux roux, qui d’une tignasse blonde. Le roux se déclarait Allemand et laissait entendre qu’il appartenait à une bonne famille de Silésie, les von Foorberg ; le blond accusait les mêmes prétentions nobiliaires par le « Van » dont il faisait précéder son nom, Reek, et se disait natif d’Anvers.

Le Von et le Van affectaient un dédain aristocratique pour les bandits roturiers avec lesquels ils opé-