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Mais le gamin interrompit leurs plaisanteries.

— Peut-être plus de gré que vous ne le supposez. Je suis jeune, mais notre rencontre vous démontre que je ne suis pas plus maladroit qu’un autre.

— Sans doute ! Sans doute ! grommela Jetty, s’intéressant peu à peu au petit… Seulement, le « Crâne » pense que la force seule est utile à ses gens… Il pense, lui ; ses hommes n’ont qu’à agir.

— Eh bien ! repartit Jud, le Crâne se trompe. La force est peu de chose… l’adresse vaut mieux.

Les interlocuteurs du gamin demeurèrent bouche bée devant l’affirmation.

Décidément, ce petit homme montrait une confiance déconcertante. Voilà qu’il critiquait le « Crâne », ce chef dont eux, des vétérans du crime, ne parlaient qu’avec déférence.

— Vous désirez des preuves ? poursuivit Jud… En voici. Savez-vous pourquoi je suis interné dans cette hôtellerie du gouvernement ?

— Ma foi non, garçon, tu t’en doutes bien.

— Alors, je vous le dis… On m’a logé ici parce que moi, un gamin, grâce à mon adresse, j’ai fait mesurer la terre à deux gros policemen, qui tracassaient une marchande de fleurs.

— Toi ? En vérité ?

Les bandits ne riaient plus. Le ton du gamin les troublait.

— Toi ? répéta Jetty.

— Moi-même… Une fois dehors, d’ailleurs, si tu doutes encore, je me fais fort de te tomber autant de fois qu’il sera nécessaire, pour te persuader que ta vigueur n’est rien, auprès de l’adresse.

Avec un homme quelconque, Jetty eût relevé le défi. Devant ce bizarre petit galopin, il ne trouva rien à répondre. Et définitivement dominé, il murmura :

— Enfin, viens avec nous. Je ne sais si tu es aussi habile que tu le prétends… Mais que je sois électrocuté à l’instant, si je ne crois pas que tu es un brave garçon !

Il s’approcha de Jud, la main tendue.

— Tope… Tu sortiras de prison avec nous, et, par l’orteil pointu d’Astaroth, je proposerai au « Crâne » de te mettre à l’essai.

Sans hésitation, le gamin plaça sa main dans celle de l’herculéen Jetty.

— Tout à fait brave garçon… répéta le bandit, flatté par cette marque de confiance.

Puis, s’adressant à son compagnon :