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— Je le serai.

— Car, ajouta affectueusement le Président, je serais fâché qu’il vous arrivât malheur à vous et à cette Jeune fille. D’autre part, il importe à la sûreté de l’État de faire toute la lumière.

Il secoua la main du professeur.

— Enfin, si je n’ai pas le droit de vous soutenir ouvertement, en l’absence de preuves matérielles, je souhaite de cœur le succès du gentleman, du complet gentleman que vous êtes.

Un instant, Jud Allan demeura devant le chef de la République Américaine. Une émotion profonde lui rendait impossible d’exprimer la gratitude dont le remplissait la sympathie de M. Loosevelt.

Ses doigts se crispèrent nerveusement sur ceux de l’homme qui, si noblement, si sincèrement, s’associait à ses douleurs.

Puis d’une voix sourde, comme enrouée par l’excès de ses sentiments :

— Au Sénat donc, dit-il, et soyez remercié.

M. Loosevelt murmura :

— Au Sénat, c’est entendu.

jusqu’au seuil, il accompagna le Jeune homme, dont la main frémissait dans sa main loyale.

Un dernier salut et Allan s’éloigna.

Il traversa les jardins de la Maison-Blanche, passa devant le square Lafayette, contourna les spacieux monuments affectés aux trois ministères de l’Extérieur, de la Guerre et de la Marine (State, War, Navy departments), et gagna le quartier qui avoisine la partie la plus haute de Reclaimed-flats, au delà du canal de Washington et des Flushing-Lakes qui lui font suite.

Là, au milieu d’une rue étroite, il disparut dans une maison portant sur sa façade une singulière peinture à la détrempe, laquelle représentait une sorte de faisceau de jeunes garçons et de jeunes filles attachés en botte par un cordeau.

Que signifiait cette allégorie ?

Quelques minutes plus tard la porte se rouvrit.

Deux personnes parurent sur le seuil.

L’une était Tril, le petit steward auquel le professeur avait parlé sur le quai du canal Washington.

L’autre semblait un vieillard courbé par l’âge, au visage émacié, sillonné de rides, et dont le chapeau de feutre laissait passer la longue chevelure d’un blanc gris.