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cent où l’on sentait les palpitations de son cœur, il disait :

— Bonjour, Lilian !

Mais il demeura stupéfait. Un organe, qui n’était pas celui de sa sœur, lui avait répondu :

— Je vous salue, Maître Allan !

Grace Paterson était devant lui, souriante, avec une crânerie inaccoutumée dans le regard.

— On m’avait dit que je trouverais ma sœur chez elle, commença-t-il quelque peu surpris de l’absence de la jeune fille…

— On a pu vous le dire, répliqua paisiblement son Interlocutrice, car elle était ici, il n’y a encore qu’un instant.

— Ah ! elle va revenir.

— Je ne le pense pas.

Et Allan ayant un soubresaut, la fillette continua gravement :

— Elle vous a aperçu causant avec Miss Deffling, et elle s’est retirée aussitôt.

— Elle m’a vu et elle s’est retirée ! Vraiment, je ne conçois pas le sens de cela…, à moins que ce ne soit un jeu, auquel le caractère de Lilian ne m’a point habitué.

— Ce n’est pas un jeu.

Encore qu’elle se contraigne à la gravité, la mutine Grace semblait prête à succomber à un accès d’hilarité. Les efforts qu’elle faisait pour se contenir amenaient à ses joues une coloration plus vive.

Allan répéta ces trois syllabes comme un homme qui renonce à déchiffrer un rébus.

— Non, pas un jeu, Master Allan, mais un sentiment très délicat de sa respectabilité.

Et le professeur la considérant d’un air ébahi, elle reprit imperturbablement :

— Sans doute ! Lilian ne croit pas pouvoir recevoir en solitude un gentleman qui n’est pas son frère.

Prêcher le faux pour savoir le vrai. Éternel piège où tombent les plus maîtres d’eux-mêmes.

Allan eut un cri :

— Qui le lui a dit ?

— Mais vous-même, qui venez de vous trahir… avant, elle n’avait qu’un doute.

Et Grace partit d’un de ces rires sans fin dont elle était coutumière.

Pourtant, sa gaîté se glaça en voyant son inter-