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Psyché aux concerts du Châtelet, une fort intéressante étude, M. Arthur Coquard, rappelle, à propos de sa bienveillance et de son équité envers les vivants, l’anecdote suivante :

« L’une des dernières paroles qu’il me dit concerne Saint-Saëns et je suis heureux de la reproduire fidèlement. C’était le lundi soir, quatre jours avant sa mort. Il éprouvait un mieux relatif et je lui donnais des nouvelles du Théâtre lyrique, auquel il s’intéressait vivement. Je lui parlais naturellement de la soirée d’ouverture, de Samson et Dalila, qui avait obtenu un grand succès, et j’exprimai en passant mon admiration pour le chef-d’œuvre de M. Saint-Saëns. Je le vois encore tournant vers moi sa pauvre figure souffrante pour me dire vivement et presque joyeusement, de cet accent vibrant que ses amis connaissaient : « Très beau ! très beau ! ». Ce trait peint admirablement un des côtés de cette attachante physionomie d’artiste.

Une autre particularité à signaler chez César Franck était une sorte de désintéressement des applaudissements de la foule. Le petit nombre venait à lui, le comprenait, le fêtait ; l’audition de ses compositions, lorsqu’elles répondaient à l’idéal qu’il s’en était fait, le ravissait : cela lui suffisait. Il ne paraissait même pas s’apercevoir de l’indifférence que le public témoignait pour son œuvre ; il en était trop éloigné pour qu’il y fît la moindre attention. L’art, rien que l’art, tel était son ciel.