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NOTICE SUR SOLNESS

mieux aux scènes où la folie naissante de Solness se dessine plus clairement, à son dialogue avec le médecin et à sa conversation avec sa femme : dans l’un comme dans l’autre, l’architecte, tout en niant cette folie avec la violence habituelle des individus qui se croient suspectés, épie les paroles, les gestes de ses interlocuteurs, tremblant d’y lire un arrêt, et animé cependant de l’envie fébrile de savoir la vérité coûte que coûte. Et surtout il s’étudie, il s’épie lui-même, il plonge ses regards jusqu’au fond de son âme et de son cerveau, et ce qu’il y trouve, que ce soit du bien ou du mal, il l’en retire, il l’étale, il demande à l’un et à l’autre ce qu’ils en pensent, car il est arrivé à cet état où l’on ne peut plus vivre avec soi-même, où l’homme silencieux, passionné et génial, se sent étouffé par un engorgement de sentiments et d’idées inexprimées qui fermentent en lui, où il crache et vomit, en quelque sorte.