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comme elle est fière et belle !… eût-il murmuré ces paroles dans l’endroit le plus caché d’Ostraat, je les aurais entendues quand-même.

Comme je le hais, comme je l’ai toujours haï, ce Nils Lykke. Aucun homme n’est comme lui, dit-on. Il joue avec les femmes puis les écrase sous ses pieds, et c’est à lui que ma mère songea me donner. Comme je le hais.

On le dit autrement fait que les autres hommes, cela n’est pas vrai, il n’y a rien de singulier en lui, beaucoup sont comme lui. Quand Bjorn me contait les légendes, tous les princes charmants ressemblaient à Nils Lykke. Quand seule ici, je restais dans cette salle à rêver ; quand, dans ma pensée, passaient et repassaient les chevaliers d’autrefois, tous ressemblaient à Nils Lykke.

Comme c’est étrange et bon en même temps de haïr. Jamais, avant ce soir, je n’ai su combien douce était la haine ; non, pour mille ans de vie, je ne donnerais l’instant que j’ai vécu depuis que je l’ai vu…

Sang de Dieu ! comme elle…