Page:Ibsen - Les Soutiens de la société, L’Union des jeunes, trad. Bertrand et Nevers, 1902.djvu/238

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
226
THÉATRE

bellan, permettez-moi de causer un instant seul avec vous.

stensgard. — Folie ! Je n’ai rien à te dire à toi. M. le chambellan, soyez à la fois habile et sage. Une famille comme la vôtre a besoin d’alliances nouvelles ; sans cela la race s’abêtit.

bratsberg. — Non, c’est par trop fort !

stensgard. — Chut ! Ne vous excitez pas ! Renoncez à vos fastidieux préjugés de naissance : il n’y a que de la bêtise au fond de tout cela. Vous verrez quel ami vous avez en moi, quand vous me connaîtrez mieux ; vous serez heureux de me compter au nombre des membres de votre famille. Oui, vous et votre fille aussi, je saurai l’y contraindre.

bratsberg. — Que pensez-vous de cela, docteur ?

fieldbo. — Je pense que c’est de la folie.

stensgard. — Oui, de ta part ce serait de la folie, mais moi j’ai un rôle à remplir dans le monde et je ne me laisse pas arrêter par des phrases et des hauts cris.

bratsberg. — Monsieur l’avocat, voici la porte !

stensgard. — Vous me chassez ?

bratsberg. — Sortez !

stensgard. — Réfléchissez, monsieur le chambellan !

bratsberg. — Sortez, vous, dis-je. Vous êtes un chevalier d’industrie et un… un… J’ai oublié le mot… Voilà ce que vous êtes !

stensgard. — Qu’est-ce que je suis ?

bratsberg. — Un… un… le mot me vient sur les lèvres… sortez !

stensgard. — Si vous vous mettez sur mon chemin, malheur à vous !