aslaksen. — Oui, mais ses bonnes intentions ne m’ont pas servi à grand’chose. Là, dans cette salle, où ils sont assis à trinquer et à boire, je me suis assis moi aussi, j’étais comme eux élégant, bien vêtu. Et cette existence me convenait, à moi, qui ai tant lu et qui brûlais de jouir de tout ce qu’il y a de beau dans la vie. Mais combien de temps suis-je resté dans ce paradis ? Tout s’est effondré, toute cette magnificence est tombée en pâte, comme nous disons à l’imprimerie.
fieldbo. — Votre situation ne restait pas si mauvaise ; vous aviez votre métier pour vivre.
aslaksen. — Vous me la baillez belle ! Après avoir été ce que j’ai été, une situation comme la mienne, qu’est-ce que c’est ? On m’a donné un croc-en-jambe alors que j’étais sur la glace vive et maintenant on m’insulte parce que je suis tombé.
fieldbo. — Je ne veux certainement pas vous juger sévèrement.
aslaksen. — Et vous avez raison. N’est-ce pas que cela fait un drôle de mélange : Daniel Hejre et la Providence, et le chambellan, et le sort et moi-même et les circonstances… J’ai quelquefois songé à séparer tous ces éléments et à écrire un livre là-dessus ; mais c’est si diablement enchevêtré que… (Il regarde vers la porte à gauche). Voyez, ils sortent de table.