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L’UNION DES JEUNES

sen ! (Il salue Stensgard). Un inconnu ? Vous êtes depuis peu dans le pays, sans doute ? Peut-être l’avocat Stensgard ?

monsen. — Lui-même (Il les présente l’un à l’autre). L’avocat Stensgard ; M. Daniel Hejre…

bastian. — Capitaliste.

hejre. — Ci-devant, pour s’exprimer avec précision. J’en suis maintenant soulagé de mes capitaux, débarrassé. Cependant je n’ai pas fait banqueroute.

monsen. — Buvez ! Buvez pendant que ça mousse !

hejre. — Mais n’insistons pas sur ces canailleries,… suffit ! Maintenant, espérons-le, ce n’est qu’une calamité passagère. Après en avoir fini avec mes vieux procès, je me suis colleté avec un très haut personnage qui… A sa sa santé ! Comment ? Vous ne voulez pas boire à sa santé ?

stensgard. — Puis-je vous demander quel est ce très haut personnage ?

hejre. — Ah ! Ah ! Pourquoi prenez-vous une mine si allongée ? Vous ne croyez pas, j’espère, que je parle de Monsen ? On ne peut pas dire de Monsen qu’il est un très haut personnage. C’est du chambellan Bratsberg qu’il s’agit, mon jeune ami !

stensgard. — Hein ! En affaires, le chambellan est certainement un homme d’honneur.

hejre. — Vous dites cela, jeune homme ? Suffit. (Il se rapproche.) Il y a quelques années, je valais une tonne d’or : mon père m’avait laissé une grande fortune. Vous avez sans doute entendu parler de mon père, le vieux Mads Hejre ? On l’appelait « Mads doré ». Il était armateur et avait gagné des sommes folles à l’époque de la liberté commerciale. Il avait fait dorer ses portes et ses