Page:Ibsen - Les Soutiens de la société, L’Union des jeunes, trad. Bertrand et Nevers, 1902.djvu/124

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
THÉATRE

BERNICK. — Rummel, qu’est-ce que cela veut dire ?

RUMMEL. — L’heure la plus glorieuse de ta vie a sonnée. La ville entière a décidé de donner, ce soir, une sérénade à son premier citoyen.

BERNICK. — Que dis-tu ?

RUMMEL. — Une sérénade avec musique ! Nous aurions eu aussi des flambeaux, mais nous n’avons pas osé par ce temps d’orage. On va illuminer ici. Cela fera très bon effet dans les journaux.

BERNICK. — Ecoute, Rummel, je ne veux rien de semblable.

RUMMEL. — C’est trop tard. Ils seront ici dans une demi-heure.

BERNICK. — Pourquoi ne m’as-tu pas prévenu ?

RUMMEL. — J’avais peur que tu me fisses des objections. Au reste, je me Suis mis d’accord avec ta femme. Elle est ma complice et s’occupe des rafraîchissements.

BERNICK. — Qu’est-ce ? Viennent-ils déjà ? Il me semble entendre des chants…

RUMMEL. — Des chants ?… Non, ce sont les Américains ; c’est le départ de l’Indian Girl.

BERNICK. — Elle part ?… Non, je ne puis ce soir Rummel, je suis souffrant.

RUMMEL. — En effet, tu as mauvaise mine. Il faut que tu prennes un peu sur toi. Prends sur toi, que diable ! Si tu savais la peine que nous nous sommes donnés, Alstestd, Wiegeland et moi, pour organiser cette démonstration spontanée. Nous tenons à ce que tes adversaires soient écrasés, anéantis par cette manifestation sympathique. On a répandu dans la ville des bruits tels que nous ne