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par un certain air d'élégance dont il est redevable à ces moules qu'on désigne par le terme tournures; mais on ne peut imprimer un tel caractère à un écrit, tant qu'on n'aura pas appris par cœur ce que le discours des Arabes renferme do poëmes et de morceaux de prose.

Après avoir déterminé la signillcalioii du mot tournure (osloub), nous allons donner une définition ou description de la poésie, afin d'en faire connaître le véritable caractère. C'est toutefois là une tâche bien difficile, parce que, autant que nous le sachions, nos prédé- cesseurs n'en ont rien dit de précis. La définition reçue par les pro- sodistes et qui est conçue ainsi : La poésie est un discours métrique et rimé, ne convient pas à la poésie telle que nous l'entendons; elle n'en est pas même la description. (Il est vrai que) l'art de la prosodie consiste dans l'examen de la poésie en ce qui regarde l'accord qui doit exister entre tous les vers d'un poome, le nombre de lettres mues ou quiescentes qui s'y présentent successivement, et la confor- mité du dernier pied de chaque premier hémistiche avec le dernier pied du second hémistiche. Comme c'est là un simple examen qui a pour objet le mètre seulement, à l'exclusion des paroles et de leurs significations, la définition donnée par les prosodistes est bonne, à leur point de vue; mais, pour nous qui envisageons la poésie soiis les divers aspects de la syntaxe, de l'expression, du mètre et des tournures qui lui sont spéciales, il est certain que cette définition ne P. 335. saurait convenir. Aussi sommes nous obligé d'en donner une qui fasse connaître le caractère réel de la poésie telle que nous le com- prenons. Donc nous dirons que la poésie est un discours effectif \ fondé sur la métaphore et les descriptions , et divisé en portions qui se corres- pondent par la mesure [prosodique) et par la rime; portions qui, chacune, indépendamment de celles qui les précèdent et qui les suivent, expriment une pensée complète et ont un objet déterminé; {enfin nn discours) ayant une marche réglée d'après les formes (osloub) particulières que les Arabes

' Le terme iJo sert ici à indiquer que le discours a parfailemenl atteint son bui , sa- voir : lu juste expression de la pensée.

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