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adoptèrent, cependant, pour la prose, la marche et les mouvements qui appartiennent spécialement à la poésie; ils employèrent très-fré- quemment l'allitération , s'appliquèrent à faire rimer les phrases ensemble, et, avant d'entrer en matière, ils se plaisaient à décrire la beauté de la bien aimée. Si l'on examine avec attention cette es- pèce de prose, on reconnaîtra qu'elle forme une brar>che de la poésie, dont elle ne' se distingue que par l'absence de la mesure. Les écrivains-rédacteurs ont persisté à cultiver ce genre de compo- sition et à l'employer dans les pièces émanant du souverain; ils s'y^ tiennent, parce qu'ils le regardent comme le meilleur; ils y mêlent les tournures propres à la poésie et abandonnent la prose libre au point de l'oublier. (]eci est surtout vrai en ce qui regarde les écri- vains de l'Orient. Aussi les pièces officielles rédigées par ces gens P. 324. inconsidérés se présenlent-elles^ toutes avec cette tournure que nous avons signalée. Mais, pour la juste expression des idées, ce sys- tème n'est nullement bon, puisque (dans le discours en prose) il faut veiller à faire accorder la parole avec la pensée, et satisfaire ainsi aux exigences du sujet; il faut marquer exactement ce qui se rap- porte à la personne qui parle et ce qui regarde la personne à qui la parole s'adresse.

Comme la prose rimée a reçu des écrivains postérieurs toutes les allures de la poésie, il faut en éviter l'emploi dans les pièces émanant du sultan. 11 est permis d'insérer dans la poésie des jeux d'esprit, de mêler les plai.santeries avec les choses graves, de s'étendre dans les descriptions, de citer des paraboles, de multiplier les compa- raisons et les métaphores; tandis qu'on n'a aucun besoin d'employer ces embellissements dans une allocution. D'ailleurs, en s'imposant l'obhgation* de faire rimer ses phrases, on ne fait que rechercher des jeux d'esprit et des ornements nullement compatibles avec la dignité d'un souverain et tout à fait déplacés dans des allocutions adressées au peuple pour l'encourager ou pour lui inspirer la crainte.

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Lisez ^_jixl' (J. * Pour (t^iiJI., lisez «./.ÀiUJI /li^Jl^.

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