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80 PROLÉGOMÈNES

gens de sa suite et une troupe de soldats qui s'était engagée à le défendre jusqu'à la mort. Aux coins du trône on dressait des élen- dai-ds, autour desquels on formait une seconde enceinte composée d'archers et de fantassins. Ce' trône, qui était d'une grandeur énorme, servait aux combattants de point de ralliement. A la bataille de Ca- deciya, Rostem, le général persan, se tenait assis sur un trône qu'on avait dressé pour lui; mais, quand il vit les rangs de ses troupes en- foncés et les Arabes sur le point de pénétrer jusqu'à lui, il quitta son siège et s'enfuit vers l'Euphrate ', où il fut tué.

Les Arabes et la plupart des peuples nomades, qui ont pour habi- tude de combattre d'après le système d'attaque et retraite, se mé- nagent un point de ralliement en formant une ligne (ou barrière) avec leurs chameaux et les autres bêtes de somme qui portent leurs femmes et leurs enfants. Ils appellent cette espèce de retranchement medjbouda. Tous ces peuples font cela dans leurs guerres, afin de s'assurer un abri contre les attaques de l'ennemi et une garantie contre les surprises et les déroutes. Cela est un fait bien constaté. Les souverains de notre époque ont totalement négligé cet usage pour adopter celui de la saca (ou arrière-garde), formée des bêtes de somme qui portent les tentes et les bagages. Cela ne vaut pas une ligne d'éléphants ou de chameaux, aussi leurs armées sont-elles très- exposées à être mises en déroute et, pendant les combats, elles sont toujours prêtes à s'enfuir.

Dans les premiers temps de l'islamisme, les armées (musulmanes) chargeaient à fond; les Arabes, il est vrai, pratiquaient alors très-bien la manière d'attaquer par charge et retraite ; mais deux motifs les portèrent à adopter l'autre système. Le premier, c'est que l'ennemi combattait ainsi, ce qui les obligeait à faire comme lui; le second, c'est que, par leur désir de faire preuve de fermeté (dans les dangers) et par l'influence de la foi, qui s'était enracinée dans leurs cœurs, ils cherchaient à mourir en combattant les infidèles, et que, poiu- y arriver, la charge à fond leur paraissait le moyen le plus expéditif.

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