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DIBN KHALDOUN. 103

Les Oméiades d'Espagne défendaient aux habitants de leur em- pire de quitter le pays pour faire le pèlerinage, parce qu'ils craignaient que ces voyageurs ne tombassent entre les mains des Abbacides. Aussi, pendant toute la durée de leur dynastie, aucun fonctionnaire de l'E- tat n'obtint l'autorisation de se rendre à la Mecque. Ce ne fut qu'après la chute de leur empire et l'établissement des rois provinciaux que cette prohibition fut levée. En second lieu, si le souverain consentait au départ d'un de ses officiers, il ne serait pas assez généreux pour s'abstenir de prendre l'argent que cet homme aurait en sa possession. A ses yeux, cet argent fait partie de sa propre fortune, de même que celui qui le possède fait partie des sujets de l'empire ; car c'est au service de l'Etat et sous l'ombre de la dynastie que cet officier s'est enrichi. Aussi le souverain vise-t-il à se l'approprier ou à l'empêcher de sortir du pays ; car, selon lui, c'est une partie^ des fqnds de l'Etat, dont cet homme n'a que l'usufruit. Admettons même qu'on parvienne à se transporter avec ses richesses dans un autre pays, ce qui n'a lieu que dans des cas extrêmement rares, le souverain de cette contrée P. 91. fixera ses regards sur les trésors apportés par l'étranger et s'en em- parera, soit indirectement, par la voie de l'intimidation, soit ouver- tement, par l'emploi de la force. Pour justifier sa conduite, il dira que cet argent, ayant été pris sur l'impôt, appartenait réellement au gouvernement, et que son meilleur emploi serait de le dépenser pour des choses d'utilité publique.

Du reste, puisque les souverains convoitent les biens de ceux qui se sont enrichis (dans le commerce, ou) en exerçant un métier quel- conque, ils doivent, à plus forte raison, ne pas perdre de vue l'argent qui provient de l'impôt, argent public^, dont ils peuvent toujours , s'emparer en vertu d'un texte de la loi ou en s'appuyant sur la cou- tume du pays. Voyez ce qui arriva au cadi de Djebela, qui s'était révolté contre Ibn Ammar, seigneur de Tripoli. Quand les Francs lui enlevèrent sa ville, il s'enfuit à Damas, d'où il se rendit à Baghdad,

' Pour If-y». , lisez 'j^. — "^ Littéral. « des empires. »

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