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LES FOULES DE LOURDES

quer pour le baigner ! il tempêtait, il avait peur de l’eau ; ah ! il nous aura fait endêver, ce polisson-là !

Je prends congé d’elle et vais réciter une dizaine de chapelet dans la chapelle de l’hôpital ; elle est très douce, cette petite chapelle, un peu sombre, plus intime que toutes les églises de Lourdes ; elle ressemble à une crypte avec la voûte de son plafond bas, son autel situé au fond, dans la pénombre, surmonté d’une Pieta, et, à quelques pas plus loin, se dresse la statue, avantageusement obscure, d’un saint dont la place se justifie bien en cet endroit, saint Jean de Dieu portant dans ses bras un malade ; des infirmes, tandis que je prie, récitent, assis sur des bancs, le rosaire ; le vacarme de l’hôpital, avec l’agitation fébrile de ses couloirs, s’éteint ici.

Et je songe, une fois de plus, à ces différences dans le mode adopté des cures. La sœur Justinien a beaucoup souffert dans la piscine, sa jambe s’est redressée mais le genou est demeuré roide et gonflé ; le petit, lui, n’a éprouvé aucune souffrance et, d’un seul coup, il a été rendu souple et valide.

Je rumine ces réflexions en sortant de l’hôpital, mais je me heurte, dès que j’ai franchi les grilles, sur un nouveau pèlerinage qui se dirige vers la grotte ; en tête marche un être automatique qui brandit un drapeau anglais. Tous, hommes et femmes arborent à leur boutonnière un ruban tricolore, aux