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— Pourquoi ne réside-t-elle pas dans ce Solesmes où elle a commencé son noviciat ?

— Parce qu’elle n’a, ainsi que moi, déniché aucune location dans ce bourg ; et puis, elle est la nièce de M. Lampre, de ce vieil original dont je vous ai parlé ; il est le seul parent qui lui reste et elle est venue se fixer auprès de lui et du monastère.

— Et ils habitent la même maison ?

— Non, ils ont beau se choyer, ils se dévoreraient s’ils vivaient constamment côte à côte ; je vous laisse à penser d’ailleurs si elle échange des coups de bec et d’ongles avec lui, lorsqu’il médit de ses chers moines !

Excepté ces deux personnes, nul, je le répète, n’est à fréquenter dans ce trou ; les paysans sont cupides et retors et quant aux gourdes armoriées, aux noblaillons qui croupissent dans les châteaux des alentours, ils sont certainement, au point de vue intellectuel, encore inférieurs aux rustres ; on se salue, lorsqu’on se rencontre et c’est tout.

— Et comment sont-ils avec le monastère ?

— Mal ; ils l’exècrent pour des causes qui, si elles ne sont pas héroïques, sont bien humaines ; d’abord les Bénédictins régissent, ici, la paroisse ; autrement dit, le curé est un des religieux de l’abbaye ; l’église du Val des Saints est à la fois abbatiale et paroissiale. Or, le père curé ne peut accepter les invitations des châtelains et parader dans leurs salons, comme le pourrait faire un prêtre plus libre ; les hobereaux n’ont donc pas de desservant qui soit à eux, sur lequel leurs femmes puissent mettre la mainmise et diriger au mieux de leurs propres intérêts ; premier grief ; — ensuite, parmi les seigneurs