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ceux inventés par Roger Van Der Weyden et par Memlinc. Elle était moins gracile et plus osseuse, un peu boursouflée, avec des yeux singuliers, taillés en boutonnières retroussées des bouts ; les paupières étaient lourdes, le nez long et le menton bref ; la face était moins en forme de cerf-volant que celle des madones de Memlinc, moins en amande que celle des madones de Roger Van Der Weyden.

La vérité était que, lui, créait des bourgeoises angéliques et, eux, des princesses divines. Ses Vierges étaient distinguées, mais elles ne l’étaient pas naturellement et elles s’observaient devant le visiteur ; de là, une certaine afféterie et une certaine gêne. Elles devaient, à force de vouloir montrer qu’elles étaient de bonnes mères, oublier de l’être ; elles manquaient, pour tout dire, de simplesse réelle et d’élans. Aussi ce panneau était-il et maniéré et charmant, et bizarre et froid. Oui, cela le résume assez bien, ruminait Durtal. Ce Daret n’avait pas le sens mystique de son condisciple Van Der Weyden et ses projections colorées d’âme étaient faibles ; mais, pour être juste, il faut ajouter aussitôt que si ses œuvres sont des oraisons de pinceau mortes, elles effluent au moins une senteur inconnue, qu’elles sont vraiment originales et dans la peinture du temps, à part.

Ici, à Dijon, cette adoration est évidemment inférieure ; elle a du reste souffert de l’humidité et passé par la cuisine des rebouteurs ; mais l’empreinte de l’artiste y semble quand même marquée.

Marie, agenouillée devant l’enfant et tournant le dos à l’étable, avère le type habituel de ses notre dame, mais elle est plus bourgeoise, plus matrone, moins raffinée