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— Tout cela, ce sont des mots, s’exclama le peintre qui s’échauffait. Que diable ! il faut bien six mois pour bâtir une œuvre, et l’on peut rester honnêtement dans un logis pendant deux termes. Enfin, du reste, peu importe. Mais tiens, puisque nous en sommes sur ce quartier, connais-tu au moins la cité Berryer ?

— La cité Berryer ?

— Oui, l’endroit où se tient, rue Royale, les mardi et vendredi, le marché ? Non, tu ne la connais pas, je le vois ; eh bien, mon cher, je me demande réellement à quoi cela te sert d’avoir logé pendant si longtemps dans ces rues ? je me demande aussi à quoi cela te sert d’avoir chez toi un tas de dictionnaires : des Littré, des Lorédan Larchey, des Souviron, tous, excepté le Bottin, le seul qui fournisse la nuance des quartiers et des rues, en révélant, pour chaque maison, le métier de ceux qui l’habitent, le seul en somme qui contienne des renseignements utiles pour les hommes de lettres !

Il est trop tard, dit-il, tout à coup, en tirant sa montre, sans cela je t’aurais emmené jusqu’au marché.

— Ce sera pour un autre jour, lança André, d’un ton dégagé. Après tout, qu’a-t-il donc de si particulier ton marché ?

— Ce qu’il a ? ah ! ! mon cher, tout ce que je te dépeindrai n’avancerait à rien. Vas-y, et tu m’en donneras des nouvelles ! Tiens, pour t’en figurer une faible esquisse, imagine-toi une longue cour cloîtrée par de hauts murs. Du noir de fumée par tout, des sillons de pluie et des lézardes zigzaguant sur toutes