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avait eu aussi des ambitions plus hautes, il avait voulu être un artiste ; l’était-il seulement ? Avait-il fait œuvre de talent, s’était-il affirmé dans le monde des lettres, avait-il dans la cohue joué des coudes, s’était-il, enfin, assis sur l’estrade, devant le public, le mâtant par sa hardiesse, ou l’apprivoisant par des bouffonneries sentimentales ou graves ? Non, il n’avait rien tenté, rien osé, rien fait. Il s’était trompé de voie, il eût dû suivre la grande route, devenir tout comme un autre, ouvrier ou commerçant. Eh non ! s’écria-t-il, je n’ai jamais rien appris et je ne sais rien ! Et, en effet, il était bachelier !

Un état manuel ? mais il eût fallu subir des années d’apprentissage ! Un commerce quelconque ? mais il ne connaissait ni la tenue des livres ni les affaires ! Il n’avait appris ni l’anglais, ni l’allemand, rien des choses pratiques, rien. Est-ce qu’il était capable d’auner de la toile, de ficeler un paquet, de cacheter une bouteille ou de planter un clou ? Pouvait-il seulement comme un ancien sergent écrire des pages de bâtarde et de ronde, ou comme un ex-brigadier panser et étriller des chevaux ? Il avait su jadis un peu de latin et un peu de grec, il savait maintenant un peu de français et c’était tout ! Et il reprochait à sa famille son instruction creuse, les dépenses inutiles du collège, les sacrifices qu’elle s’était résolument imposés pour le mettre à même de ne pouvoir jamais gagner son pain !

Puis, et cela n’était pas la faute de sa famille, cette note « passable » ; habituellement inscrite sur