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— Oh ! Pas changé du tout ! – Et, elle poursuivit, un peu piteusement : tu n’aimes toujours pas beaucoup que l’on te caresse ?

— Mais si, mais si, s’écria André qui l’embrassa tendrement, s’attardant sur ses lèvres ; puis voulant aborder une conversation moins prévue, il l’interrogea :

— Voyons, ma chère Jeanne, qu’es-tu devenue depuis cinq ans que dure notre séparation ?

— Mais rien, je te l’ai déjà appris quand tu m’as questionnée. – Et, un peu défiante, elle se renferma dans des phrases vagues.

— Enfin, tu ne me feras pas croire que tu n’aies eu, depuis que nous nous sommes perdus de vue, ni hauts, ni bas, ni plaisirs, ni peines.

— Non, bien sûr, j’ai eu de mauvais jours comme les autres, à preuve… et elle narra que ne pouvant se procurer, à une époque de chômage, du travail, elle s’était empoisonnée.

— Bah ! fit André.

— Mais oui, je me suis empoisonnée. – Et Jeanne raconta que s’étant couchée, elle avait mis une camisole blanche, et avait avalé un verre de laudanum après y avoir préalablement versé quelques gouttes d’alcool de menthe pour que ce fût moins mauvais.

— Eh bien, dit André, qu’est-il arrivé ?

— Rien, – seulement j’ai été malade, pendant quinze jours. – J’ai tout rendu sur l’oreiller.

— Ah ! – Veux-tu du sucre ? – et il lui tendit une tasse pleine de thé.