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Cette feinte n’eut aucun succès.

— Toujours observateur, ce monsieur Cyprien, répondit à la cantonade le gros homme. Mais, pour en revenir à nos moutons, dites donc, mon gaillard, continua-t-il, braquant ses yeux de veau sur la barbe d’André, vous êtes donc toujours en bisbille avec ce vieux Désableau ? Bah, vous savez, il ne faut pas lui en vouloir, ça se comprend, il n’est pas dans le négoce comme nous ; vos livres l’exaspèrent, il ne se rend pas compte que les affaires sont les affaires ; je le lui ai bien dit, moi, chacun a en magasin un assortiment approprié à sa clientèle, on ne tient que les articles qu’on a chance de vendre. Tenez, chez moi, par exemple, vous trouverez des spécialités de lingerie que la maison Buquet, et c’est une maison conséquente pourtant, ne possède pas, parce qu’elle n’en aurait point aisément le débit. – Mais enfin, tout de même, comme prétendait ma femme, l’autre jour, et pour cela, l’on peut s’en rapporter à son jugement, car c’est une femme de tête dont le plaisir est d’avoir toujours le nez dans les livres, est-ce que monsieur André ne pourrait pas écrire quelque chose de gentil, de tendre, là, vous savez, une histoire où il y aurait de l’amour, quelque chose enfin qui reposerait et qui toucherait l’âme ? Le public aime bien les romans de ce genre-là, et puis ça ferait tant de plaisir à votre famille !

— Dis donc, André, jeta Cyprien, hors de lui, Chose n’arrive pas, nous l’avons attendu assez longtemps, si nous levions le siège ?