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l’averse des conversations, la fluée des sornettes, la pluie sans fin des polkas et des valses ! Et tout, tout, et cette troupe d’imbéciles qui invitent des robes roses ou blanches à secouer leurs plis ! Et les jeunes filles donc ! Ces adorables récipients de chairs neuves où les vices transvasés des mères se rajeunissent ! Ah oui, parlons-en ! Il faut les voir quand elles remuent du pilon leurs jupes ! le mouchoir sur les genoux et la moue au bec, elles sont là, se tortillant sur leur chaise, échangeant derrière les entrechats de l’éventail des ricochets de niaiseries sordides, chuchotant comme des galopines en classe, s’envolant tout à coup avec l’affreux bavardage des perruches qu’on lâche ! puis, c’est le plongeon des graves révérences, c’est nez qui se fripe et le dentier qui flambe, c’est des oui, maman, c’est des non, ma chère, c’est des patati, c’est des patata, c’est des rires fûtés, des éclats discrets… les jeunes filles ! je les ai observées ce soir, tiens, les v’là : physiquement : un éventaire de gorges pas mûres et de séants factices ; moralement : une éternelle morte-saison d’idées, un fumier de pensées dans une caboche rose ! oui, les v’là, celles qu’on me destine, espérant qu’un jour viendra où, lassé de lire dans mon lit et d’y fumer tranquillement ma pipe, j’accepterai la misère d’un coucher à deux, l’insomnie ou le ronflement d’un autre, les coups de coude et les coups de pieds, la fatigue des caresses exigées, l’ennui des baisers prévus !

André souriait.

— Ah bien mais, dit-il, c’est très simple alors.