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Ce qu’il exécute peut être discuté, non modifié. Il semble qu’il ait une commission à faire de quelqu’un qui n’est pas l’homme. Cette exception déplaît. De là plus de huée que d’applaudissement.

Mort, il ne gêne plus. La huée, inutile, s’éteint. Vivant, c’était un concurrent ; mort, c’est un bienfaiteur. Il devient, selon la belle expression de Lebrun, l’homme irréparable. Lebrun le constate de Montesquieu ; Boileau le constate de Molière. Avant qu’un peu de terre, etc. Ce peu de terre a également grandi Voltaire. Voltaire, si grand au dix-huitième siècle, est plus grand encore au dix-neuvième. La fosse est un creuset. Cette terre, jetée sur un homme, crible son nom, et ne laisse sortir ce nom qu’épuré. Voltaire a perdu de sa gloire le faux, et gardé le vrai. Perdre du faux, c’est gagner. Voltaire n’est ni un poëte lyrique, ni un poëte comique, ni un poëte tragique ; il est le critique indigné et attendri du vieux monde ; il est le réformateur clément des mœurs ; il est l’homme qui adoucit les hommes. Voltaire, diminué comme poëte, a monté comme apôtre. Il a fait plutôt du bien que du beau. Le bien étant inclus dans le beau, ceux qui, comme Dante et Shakespeare, ont fait le beau, dépassent Voltaire ; mais au-dessous du poëte, la place du philosophe est encore très-