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Maffio, éclatant de rire après le récit de Gennaro. Veux-tu que je te dise, Gennaro ? Tu es dupe. Il n’y a dans toute cette affaire ni poison, ni contre-poison. Pure comédie. La Lucrèce est amoureuse éperdue de toi, et elle a voulu te faire accroire qu’elle te sauvait la vie, espérant te faire doucement glisser de la reconnaissance à l’amour. Le duc est un bonhomme, incapable d’empoisonner ou d’assassiner qui que ce soit. Tu as sauvé la vie à son père d’ailleurs, et il le sait. La duchesse veut que tu partes, c’est fort bien. Son amourette se déroulerait en effet plus commodément à Venise qu’à Ferrare. Le mari la gêne toujours un peu. Quant au souper de la princesse Negroni, il sera délicieux. Tu y viendras. Que diable ! Il faut cependant raisonner un peu et ne rien s’exagérer. Tu sais que je suis prudent, moi, et de bon conseil. Parce qu’il y a eu deux ou trois soupers fameux où les Borgia ont empoisonné, avec de fort bons vins, quelques-uns de leurs meilleurs amis, ce n’est pas une raison pour ne plus souper du tout. Ce n’est pas une raison pour voir toujours du poison dans l’admirable vin de Syracuse et derrière toutes les belles princesses de l’Italie Lucrèce Borgia. Spectres et balivernes que tout cela ! à ce compte il n’y aurait que les enfans à la mamelle qui seraient sûrs de ce qu’ils boivent, et qui pourraient souper