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qu’elle était la première à les détester, et puis elle était arrivée à sa phase de dévotion farouche. Dieu aidant, et le prince aussi, elle entra. Elle s’en alla au bout de six ou huit mois, donnant pour raison que le jardin n’avait pas d’ombre. Les religieuses en furent ravies. Quoique très vieille, elle jouait encore de la harpe, et fort bien.

En s’en allant, elle laissa sa marque à sa cellule. Madame de Genlis était superstitieuse et latiniste. Ces deux mots donnent d’elle un assez bon profil. On voyait encore, il y a quelques années, collés dans l’intérieur d’une petite armoire de sa cellule où elle serrait son argent et ses bijoux, ces cinq vers latins écrits de sa main à l’encre rouge sur papier jaune, et qui, dans son opinion, avaient la vertu d’effaroucher les voleurs :


Imparibus meritis pendent tria corpora ramis :
Dismas et Gesmas, media est divina potestas ;
Alta petit Dismas, infelix, infima, Gesmas.
Nos et res nostras conservet summa potestas.
Hos versus dicas, ne tu furto tua perdas.


Ces vers, en latin du sixième siècle, soulèvent la question de savoir si les deux larrons du calvaire s’appelaient, comme on le croit communément, Dimas et Gestas ou Dismas et Gesmas. Cette orthographe eût pu contrarier les prétentions qu’avait, au siècle dernier, le vicomte de Gestas à descendre du mauvais larron. Du reste, la vertu utile attachée à ces vers fait article de foi dans l’ordre des hospitalières.

L’église de la maison, construite de manière à séparer, comme une véritable coupure, le grand couvent du pensionnat, était, bien entendu, commune au pensionnat, au