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Stuart jouait de l’éventail et Élisabeth de la hache. Partie inégale. Du reste toutes deux rivalisaient en littérature. Marie Stuart faisait des vers français ; Élisabeth traduisait Horace. Élisabeth, laide, se décrétait belle, aimait les quatrains et les acrostiches, se faisait présenter les clefs des villes par des cupidons, pinçait la lèvre à l’italienne et roulait la prunelle à l’espagnole, avait dans sa garde-robe trois mille habits et toilettes, dont plusieurs costumes de Minerve et d’Amphitrite, estimait les irlandais pour la largeur de leurs épaules, couvrait son vertugadin de paillons et de passequilles, adorait les roses, jurait, sacrait, trépignait, cognait du poing ses filles d’honneur, envoyait au diable Dudley, battait le chancelier Burleigh, qui pleurait, la vieille bête, crachait sur Mathew, colletait Hatton, souffletait Essex, montrait sa cuisse Bassompierre, était vierge.

Ce qu’elle avait fait pour Bassompierre, la reine de Saba l’avait fait pour Salomon[1]. Donc,

  1. Regina Saba coram rege crura denudavit. Schicklardus In Proæmio Tarich. Jersici F. 65.