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sardés, vers la fin de sa vie, lord Clancharlie aurait eu une recrudescence républicaine telle, qu’il en était venu, affirmait-on, jusqu’à épouser, étrange entêtement de l’exil, la fille d’un régicide, Ann Bradshaw, — on précisait le nom, — laquelle était morte aussi, mais, disait-on, en mettant au monde un enfant, un garçon, qui, si tous ces détails étaient exacts, se trouverait être le fils légitime et l’héritier légal de lord Clancharlie. Ces dires, fort vagues, ressemblaient plutôt à des bruits qu’à des faits. Ce qui se passait en Suisse était pour l’Angleterre d’alors aussi lointain que ce qui se passe en Chine pour l’Angleterre d’aujourd’hui. Lord Clancharlie aurait eu cinquante-neuf ans au moment de son mariage, et soixante à la naissance de son fils, et serait mort fort peu de temps après, laissant derrière lui cet enfant, orphelin de père et de mère. Possibilités, sans doute, mais invraisemblances. On ajoutait que cet enfant était « beau comme le jour », ce qui se lit dans tous les contes de fées. Le roi Jacques mit fin à ces rumeurs, évidemment sans fondement aucun, en déclarant un beau matin lord David Dirry-Moir unique et définitif héritier, à défaut d’enfant légi-